Catherine Portevin, Philosophie magazine
François Morel a emboîté le pas au texte testament de Jack London publié en 1906, qui imprime sa ligne à cette très libre petite collection. Mais quand notre chroniqueur drolatique emboîte le pas, c’est forcément en marchant l’air de rien à côté, un pied pataugeant dans le caniveau plutôt que les deux bien droits sur le trottoir. La vie, avec lui, n’a pas de leçon à donner : elle est changeante, provisoire, inattendue, une toute petite biographie parmi tant d’autres qui vit ses souvenirs au présent. Qu’est-ce que la vie ? Le premier amour, un désir tenace qui fait passer « les hommes » de l’enfance à l’âge adulte. Car « les hommes, affirme François Morel, de tout temps et dans tous les pays », ont été « définitivement, irrémédiablement, douloureusement, secrètement (…) amoureux d’Isabelle Samain ». Ils ont eu madame Feuille en Français, ils ont gravé « Isabelle Samain, je t’aime » sur l’arrêt de bus, ils ont prié la nuit « Notre Père qui êtes aux cieux, faites que je fourre, que je tranche, que j’enfouraille ». Et c’est toujours « aujourd’hui que je vous aime ». Même les filles s’y reconnaîtront.