Boroboudour. Voyage à Bali, Java et autres îles
Roger Vailland
Préface de Marie-Noël Rio
Romancier, Roger Vailland était également grand reporter, tirant de ses voyages des récits pleins d’éclat, d’intelligence et de clarté de vue. En 1950, il part pour l’Indonésie, un an après la reconnaissance par les Pays-Bas de l’indépendance de leur ancienne colonie. De Java à Bali en passant par Sumatra, l’écrivain voyageur brosse le portrait saisissant d’une jeune nation et de ses habitants à travers leur passé et leur avenir.
« La fraîcheur de vue, la chaleur de cœur, la vivacité de l’intelligence – qu’on y ajoute ce grain de sage folie et d’enfance préservée qui est le sel de l’esprit, voilà le léger bagage du voyageur Vailland. Que faut-il d’autre pour prendre la route et se laisser séduire à la suivre ? », écrivait Claude Roy à propos de cet ouvrage.
En 1928, Roger Vailland (1907-1965) entame une carrière de journaliste, voguant entre les grands reportages (Balkans, Proche-Orient, Abyssinie) et la vie nocturne de Montparnasse. En 1942, il entre dans la Résistance et entreprend la rédaction de son premier roman, Drôle de jeu (prix Interallié 1945), qui paraîtra à la Libération. Anticonformiste, libertin et humaniste, Roger Vailland est notamment l’auteur de La Loi (prix Goncourt 1957), 325 000 francs, Les Mauvais coups, Beau masque, Éloge du cardinal de Bernis et La Truite.
Évelyne Pieiller, La Quinzaine littéraire
À la fin de 1950, Vailland part pour un reportage sur l’Indonésie, qui vient d’accéder à l’indépendance. Il a la quarantaine, est déjà un écrivain reconnu, mais n’entend pas renoncer au journalisme, qui permet d’étreindre la réalité rugueuse, pour citer Rimbaud — approximativement —, dont la figure l’accompagne pendant ce voyage. L’époque est agitante. Entre la guerre en Corée, la toute nouvelle République populaire chinoise, et Ho Chi Minh en Indochine, chacun est sommé de choisir son camp. Et c’est précisément ce qui donne à ce récit de voyage son très vif intérêt, et sa séduction. Vailland lit l’histoire en marxiste, ce qui lui évite non seulement de batifoler dans les banalités touristiques, mais également de se contenter d’un confortable point de vue moral, qui se satisferait de la victoire des « opprimés » sur les « oppresseurs ». […] Rien n’est simple, rien n’est pur. Tractations, négociations, contradictions. Le révolutionnaire exige la vertu, et voile les seins des Balinaises — pour les protéger des touristes, qui remplissent les caisses de la société néerlandaise qui a le monopole du trafic maritime et routier. Vailland détaille les grands principes de la colonisation néerlandaise, les nouveaux enjeux, les nouvelles dynamiques — dont l’islam, qui serait, dans sa version indonésienne, « la religion la plus tolérante du monde »… Mais par-delà le concret de l’analyse, ce qu’il salue, c’est la fin de l’exotisme, la fin de « l’homme blanc », prélude à une « société sans classes » qui enrichira « à l’infini les structures humaines ». Et c’est bien là ce qui attache : car le déchiffrement politique d’un monde singulier ne se dissocie jamais de l’aspiration à la fin de l’exil, la fin de la dépossession, le surgissement rendu possible de la vraie vie, désaliénée, à inventer…
Tout arrive, France Culture
Table ronde animée par Arnaud Laporte, dans l’émission Tout arrive, sur France Culture, consacrée au livre Boroboudour, de Roger Vailland.
ISBN : 9782916136141
ISBN ebook : 9782373851007
Collection : La Grande Collection
Domaine : Littérature française
Période : XXe siècle
Pages : 240
Parution : 1 octobre 2008