Du sang sur la lune
Jim Tully
Préface et traduction de l’anglais (États-Unis) par Thierry Beauchamp • Ouvrage publié avec le concours du Centre national du Livre
Précurseur du roman noir américain, Jim Tully a toujours revendiqué sa singularité et sa liberté, qui l’ont mené de la misère du Midwest aux fastes d’Hollywood. Dans Du sang sur la lune, il raconte son parcours tumultueux, entre orphelinat et trains de marchandises, rings de boxe et usines – en passant régulièrement par les maisons closes.
Un récit palpitant et haut en couleur dans lequel Jim Tully rend hommage à ceux qui furent des années durant ses compagnons d’infortune : les laissés-pour-compte d’une Amérique brutale et individualiste.
Né en 1886 dans l’Ohio, Jim Tully fut placé dans un orphelinat très jeune. Il y passa plusieurs années avant de devenir garçon de ferme et chaînier.
En 1901, il entama sa vie de « gamin du rail » et arpenta le pays d’est en ouest et du nord au sud, avant de se poser dans l’Ohio en 1907, où il se mit à écrire. En 1908, il décida de se lancer dans une carrière de boxeur professionnel, histoire de rentabiliser l’enseignement pratique reçu sur la route. Son premier livre, Emmett Lawler, fut publié en 1922. Ce galop d’essai lui ouvrit les portes des studios d’Hollywood : la Samuel Goldwyn Producing Corporation le recruta comme lecteur de scénarii. En 1924, Charlie Chaplin l’engagea comme chargé de relations publiques et conseiller spécial pendant la production et le tournage de La Ruée vers l’or. Dès lors, Jim Tully se partagea entre la littérature et ses activités journalistiques pour American Mercury, Esquire, Liberty, Photoplay, Vanity Fair et de nombreux autres magazines.
Entre 1924 et 1930, les succès littéraires de Jim Tully s’enchaînèrent. Dans ces ouvrages, il évoque des univers très différents : ceux d’Hollywood, du cirque, de l’orphelinat et de la prison. Par le détail concret et le mot juste, il était devenu un maître de l’esquisse réaliste et l’un des précurseurs d’un style auquel le roman noir offrirait bientôt ses lettres de noblesse : le hard-boiled.
Épuisé par plusieurs attaques, il s’éteignit le 22 juin 1947 à Los Angeles. Il n’avait pas encore soixante et un ans.
Télérama • Laurent Rigoulet • TT
En 2016, un personnage endiablé tombait des cieux étoilés de la littérature américaine. Il était presque temps de le remarquer. Jim Tully (1886-1947) était l’un des romanciers les plus célèbres d’Amérique avant la Seconde Guerre mondiale. Un enfant des grands chemins, dur à cuire, fêtard, buveur, qui tailla sa route jusqu’à Hollywood où il épaula Chaplin et devint un journaliste à la plume particulièrement libre et acide. On l’a découvert ici avec Les Vagabonds de la vie, petit chef-d’œuvre brut d’une forme picaresque à l’américaine dont London et Kerouac poussèrent à fond la carburation. Les routes parcourues en toute liberté par Jim Tully, depuis l’enfance, étaient celles de la grande dépression, les chemins de fer de ses amis hobos qui fuyaient autant la poisse et la misère que les contraintes du labeur. Il avait mis en œuvre un « cycle des bas-fonds » et la critique souvent enthousiaste le compara à Gorki pour « sa capacité à illuminer les figures de pauvres et de désespérés ». Publié en 1931, Du sang sur la Lune, dernier volume de la saga, reprend la même piste rebelle et, avant de filer ses aventures, le romancier règle ses comptes avec ses censeurs, les « cartouches d’encre des soldats de la morale qui portent la vérité comme un masque ». Lui reproche-t-on de romancer sa vie ? Il jure que non : « La vie et ses pitoyables buts m’intéressent plus que la littérature. Chaque homme est une histoire éternelle — que son existence soit étroite comme une cellule de prison ou vaste comme celle de Balzac. » La sienne se répète, marquée par la figure de son fascinant grand-père, migrant de la faim. Les péripéties filent bon train entre rings de boxe et bordels, champs de foire et ateliers d’usine. Tully a un don singulier pour entretenir la tension, semer le danger et faire visiter au pas de course l’envers du décor d’une Amérique légendaire. Quand il met un point final à ce livre, il a 45 ans, il lui en reste seize à vivre, mais il peine à développer d’autres thèmes que ceux de ses errances et mourra dans la dèche aux premiers jours de l’été 1947.
Rolling Stone • Philippe Blanchet
On connaît mal l’œuvre de Jim Tully (1886-1947), malgré les récentes éditions dont cet ouvrage fait aujourd’hui partie. Pourtant, ses récits sur ses années de jeunesse, évoquant le vagabond fauché sautant de train en train, l’ouvrier dans les usines de chaînes, le boxeur, font de cet écrivain au style sec et brutal, extrêmement moderne, le prince des hobos, et le précurseur flamboyant d’un Kerouac ou d’un Woody Guthrie. Du Sang sur la lune, dernier volet de son « Cycle des bas-fonds », offre un aperçu réaliste de ces années d’errance dans l’Amérique à l’aube du XXe siècle, et une excellente introduction à son œuvre autobiographique. hardboiled.
ISBN : 9782373852363
Collection : La Grande Collection
Domaine : États-unis
Période : XXe siècle
Pages : 320
Parution : 23 septembre 2021