Librairie L’Attrape-Cœurs, Paris • Erika
Dans la vie du libraire, il y a beaucoup de coups de cœur et puis, plus rarement, il y a un coup de foudre. Ce moment où on sait qu’on est un train de lire un livre qui va nous marquer durablement, et qui n’est pas près de quitter nos tables. Assurément, Ni loup ni chien appartient à cette catégorie.
Kent Nerburn a déjà publié deux recueils de témoignages d’Amérindiens, qui ont eu un certain écho, quand il est contacté par la petite-fille d’un vieil indien lakota. L’homme a lu ses livres et veut lui parler, mais il ne touche pas au téléphone et ne se déplacera pour rien au monde.
Ni loup ni chien, c’est l’histoire d’un vieil homme un peu roublard qui a des choses à dire et qui veut être entendu, et d’un journaliste blanc qui fait de son mieux pour retranscrire une culture qui n’est pas la sienne et qui perd parfois patience. Mais c’est surtout l’histoire d’une amitié improbable tricotée sur les cendres d’une culture massacrée, et de deux hommes qui malgré le passé, malgré les horreurs et sans jamais éluder les incompréhensions, se rencontrent pour faire un livre.
Dan raconte, réfléchit à voix haute, change d’avis, s’amuse à perdre son interlocuteur, refuse de se laisser enfermer dans la vision blanche de l’indien, fut-elle idéalisée. Kent écoute, réagit, tente d’éviter les maladresses, s’énerve d’être tourné en bourrique, s’en va, revient…
Ce livre c’est une bouffée d’oxygène dans un monde où l’on voudrait de plus en plus assigner chacun à sa place et ranger les gens dans des cases. C’est un acte de foi dans la force du dialogue comme seule chemin valable. Imparfait, chaotique, jamais évident, mais salvateur.
Se mettre en route l’un vers l’autre, c’est ce que font Kent et Dan dans leur improbable pickup déglingué, et la rencontre est bouleversante ! Alors, arrêtez tout et embarquez sur les routes cabossées de l’Amérique amérindienne avec Kent, le vieux Dan, l’impassible Grover et la chienne Fatback… Inoubliable !