Olivier Mony • Livres Hebdo
Paris, 1936. Joseph Kessel en a un peu assez de ses sempiternels reportages autour de la pègre, des bas-fonds de l’âme, des nuits fauves des capitales. Invité, par son ami le cinéaste Anatole Litvak, il s’embarque vers ce qui lui paraît en être le plus éloigné de cela, « l’usine à rêves » du monde entier, Hollywood. Il y restera quelques mois, bien introduit, y rencontrera tout le monde, écrira quelques articles qui tous témoigneront moins de son ébahissement que d’une certaine forme d’amertume légèrement amusée envers les coulisses de ce décor et de cette société régie par une règle implacable : l’argent.
Ce sont ces textes, où plus que jamais sont mis en valeur les dons d’observation du grand reporter, qu’ont aujourd’hui la bonne idée de publier les éditions du Sonneur. Pour être mince, car Kessel savait aller vite et à l’essentiel, ce volume n’en est pas moins délicieux. La verve de l’auteur s’y exprime par son incapacité à se laisser duper par ce gigantesque mirage, essentiellement industriel plus qu’artistique, qu’est cette ville dans la ville et le jeu de rôles qu’y jouent ses habitants : producteurs tout-puissants ou étoiles de celluloïd qui supportent mal la pleine lumière du jour et du regard de Kessel, qui en a vu d’autres.