Les Huit Enfants Schumann
Nicolas Cavaillès
Mention spéciale du Prix Françoise Sagan 2017
« En Schumann, la musique avait trouvé l’une de ces proies de choix qui, promptes à céder aux sirènes esthétiques, leur aliènent bientôt toute leur existence, quitte à nuire à leurs proches et à les emporter avec elles dans leur chute. Tel fut le lot des enfants Schumann. »
Nicolas Cavaillès retrace dans cet ouvrage le destin du compositeur et de la pianiste Robert et Clara Schumann, et de leurs huit enfants, tous frappés – de près ou de loin – par l’impératif absolu de l’art. Il sonde ainsi les notions d’héritage et de transmission familiale, et offre une réflexion subtile sur l’enfance, l’individualité et l’infinie solitude de l’homme.
Né en 1981, Nicolas Cavaillès est l’éditeur de Cioran dans la Pléiade (Gallimard, 2011) et l’auteur de Vie de monsieur Leguat qui a remporté le prix Goncourt de la Nouvelle 2014 et de Pourquoi le saut des baleines, Prix Gens de mer 2015, Les Huit Enfants Schumann, mention spéciale du jury du Prix Françoise Sagan et du Mort sur l'âne.
Stéphane Bou, Le Canard enchaîné
Des huit enfants du musicien Robert Schumann, aucun ne parvint à se faire un prénom. Dans ce livre singulier, chacun a droit à son chapitre, comme autant de brèves nouvelles racontant leurs petites existences anonymes, vécues dans l’ombre de leurs deux génies de parents.
Car il n’y eut pas que le père, Robert. Dans la famille Schumann, je demande la mère… Et voici la mythique Clara, une des pianiste les plus célèbres de son temps. Même si Nicolas Cavaillès est comme un spectateur de cinéma qui préfère s’intéresser aux figurants plutôt qu’aux héros, son livre est aimanté par ce personnage hors norme, cette Clara Schumann, qui gouverna son existence avec dureté, en se demandant pourquoi son monde ne cessait de s’écrouler autour d’elle. Son mari, d’abord (interné dans un asile, où il mourut) ; la plupart de ses enfants, ensuite.
Clara classait sa descendance entre forts et faibles compétents et irrécupérables. Quelques-uns s’en sortirent (un peu) mieux que d’autres, mais la succession de leurs destins se lit comme le récit d’une malédiction. Clara interdit a Félix, qui voulait devenir poète, d’écrire sous son nom : pas assez talentueux pour s’appeler Schumann.
Elle interdit à Julie de se marier : pas assez solide pour endurer une grossesse. Ludwig ? Tout le monde le trouve benêt, avant qu’on s’aperçoive qu’il est avant tout myope et sans lunettes. Il sera interné pendant trente ans. Sa mère l’a visité une fois, sans jamais plus revenir.
Elle l’appelait son « enterré vivant ».
Charles Ficat, La Revue des deux mondes
Remarqué en 2014 pour son Goncourt de la nouvelle, Vie de monsieur Leguat, puis en 2015 avec Pourquoi le saut des baleines (lauréat du prix des Gens de mer), Nicolas Cavaillès revient en librairie avec une méditation sur la descendance du couple Robert et Clara Schumann. Ces deux musiciens de génie ont engendré pas moins de huit enfants qui à des degrés divers ont tous été marqués par le démon de l’art. Morts à des époques différentes – Émile partira le premier à l’âge d’un an en 1847 alors que sa sœur Eugénie s’éteindra en 1938 –, ils portent chacun en héritage une trace de la folie paternelle. Ces orphelins ont affronté de plein fouet la relation tumultueuse de leur père à sa propre enfance, marquée par la solitude et la mort. Dès lors, à ce dernier la musique se révéla une échappatoire dans laquelle exprimer ses angoisses et ses tourments. C’est cette douleur qui rend aujourd’hui les compositions de Robert Schumann si poignantes – au-delà des épreuves de son destin.
Dans la vie de chaque enfant Schumann repose une profonde souffrance intérieure, un mystère indicible, un fardeau secret. Ce tableau de famille restitue l’ampleur du drame qu’on n’aurait pas imaginé si pesant. En une langue travaillée, Nicolas Cavaillès a recomposé cette tragédie généalogique qui participe de l’histoire du romantisme, mais s’inscrit dans une réflexion plus large encore : « Ainsi nourrissons-nous au fond de nous-mêmes, nous autres excroissances que l’on appelle adultes, à la fois l’obscur regret de notre animalité originelle, et une méconnaissance amère et lâche de cette créature aux mille visages et aux mille souffrances, muette et polymorphe, malléable et non moins fugitive, que l’on appelle enfant. » Cette plainte doublée d’une interrogation trouve un écho jusqu’à nous. Il suffit de réécouter les Scènes d’enfants de Robert Schumann pour s’en persuader tant les variations du piano bouleversent notre sensibilité.
ISBN : 9782916136974
ISBN ebook : 9782373850307
Collection : La Grande Collection
Domaine : Littérature française
Période : XXIe siècle
Pages : 72
Parution : 11 mai 2016