Mon tour du monde
Charlie Chaplin
Inédit en français • Traduit de l’anglais par Moea Durieux • Ouvrage traduit avec le concours du Centre national du livre
Février 1931 : Charlie Chaplin (1889-1977) rejoint son Angleterre natale pour y présenter son dernier film, Les Lumières de la ville. Abattu par des problèmes personnels, déstabilisé par l’avènement du cinéma parlant, il ressent le besoin de s’éloigner de son travail, de ses affaires et des États-Unis, son pays d’adoption.
Une fois à Londres, il décide d’entreprendre un tour du monde qui le mènera, au gré de ses rencontres, en Allemagne, en Autriche, en Italie, en France, en Algérie, en Espagne, en Suisse, au Sri Lanka, à Singapour, en Indonésie, au Japon. Au faîte de sa gloire, il est accueilli à chacune de ses étapes comme une véritable star et est reçu par les personnalités – politiques, artistiques et scientifiques – de l’époque : Winston Churchill, Marlène Dietrich, Albert Einstein, H. G. Wells, Aristide Briand, Gandhi, Albert Ier de Belgique…
S’il est grisé par sa notoriété, Charlie Chaplin reste des plus attentifs à la crise qui secoue alors le monde. Il observe, écoute, analyse, s’engage. Ce voyage de près d’un an et demi confirmera le cinéaste dans ses préoccupations : à son retour aux États-Unis, il réalisera Les Temps modernes en 1936 et Le Dictateur en 1940, illustrations éminemment économique et politique des constats que Chaplin aura faits lors de son tour du monde.
Anne-Marie Mitchell, La Marseillaise
Notre passion du livre ancien fait que nous avons dans notre bibliothèque celui écrit en 1933 par Carlyle T. Robinson, le secrétaire particulier du vagabond le plus célèbre, viré comme un malpropre par ce dernier : La Vérité sur Charlie Chaplin. Pas vraiment rancunier, Robinson nous permet de découvrir un comédien acharné à défendre la pantomime et le cinéma muet (où l’imagination des spectateurs supplée aux paroles absentes), mais aussi un homme (ce qui ne l’empêche pas de lui garder une fidélité admirative) plutôt muflard dans ses relations avec les autres, toujours prêt à s’enticher du premier jupon qui passe et à l’ambition) quelque peu démesurée (ne rêva-t-il pas d’incarner Hamlet, Napoléon et Jésus-Christ ?) Après tout, nul n’est irréprochable et la fierté inspirée par une juste confiance en soi est des plus compréhensibles. Mais si nous avons pensé devoir citer ce livre, c’est parce qu’il y est question du séjour de l’artiste en Europe et particulièrement sur la Côte-d’Azur. Séjour effectué en 1931, alors qu’il vient d’achever Les Lumières de la ville, et raconté par Chaplin dans Mon Tour du monde publié pour la première fois en France, à l’occasion du centenaire de la création du personnage de Charlot, dont la démarche de pingouin l’amena au sommet d’une gloire internationale. Récit dans lequel nous retrouvons les qualités et les défauts, ouvertement avoués par un comédien décidé à veiller sur ses lauriers, à ne pas se laisser distraire de son travail, malgré ses déboires personnels, l’avènement du parlant, les désillusions de la renommée et de la fortune. « L’amour et les gens me lassent. Je veux revivre ma jeunesse, saisir à nouveau les atmosphères et les sensations de l’enfance. J’ai besoin de remonter le temps. » Et quoi de plus salutaire que de faire un tour du monde pour échapper à cette lassitude, quitte à affronter, dans toutes les villes où il demeure quelques jours ou quelques semaines, l’assaut des appareils photo « devant une foule déchaînée que la police a bien du mal à contenir. » Même si nous le suivons dans ses visites chez les plus grands de ce monde (la plupart conservateurs), nous ne pouvons qu’être touchés en le voyant s’apitoyer sur le peuple londonien défavorisé (dont il est issu), ou en l’entendant proposer, à l’occasion d’un dîner à la Chambre des Communes, le contrôle des profits, la réduction du temps de travail et la mise en place d’un salaire minimum. Nous partageons de même son inquiétude lorsqu’il se fait le témoin, en Allemagne, d’un avenir qui s’annonce des plus sombres. Un livre passionnant qui pétille d’anecdotes et d’observations.
Nicolas Ungemuth, Le Figaro magazine
C’était juste après la sortie des Lumières de la ville. Début 1931, Charlie Chaplin décide de souffler en s’offrant un tour du monde qui durera seize mois, et d’en offrir le récit aux lectrices de Woman’s Home Companion. Il est en train de divorcer de sa deuxième femme, a des ennuis avec le fisc et s’inquiète de l’arrivée du cinéma parlant. Mais Les Lumières de la ville triomphent, et c’est rasséréné que le cinéaste entreprend son voyage. À Londres, ville de son enfance, il visite l’orphelinat où il passa quelque temps et soupe avec Churchill et Bernard Shaw. À Berlin, il sympathise avec Einstein. En Normandie, il chasse le sanglier à l’épieu avec le duc de Westminster. À Nice, il festoie en compagnie d’Oswald Mosley (« L’un des jeunes hommes politiques les plus prometteurs »), qui fondera quelques mois plus tard la British Union of Fascists. À Grasse, il séjourne chez H. G. Wells. À côté de Monte-Carlo, il dîne avec Morand. Puis file à Alger avant de rejoindre Douglas Fairbanks pour deux mois de ski à Saint-Moritz. Plus tard, c’est Rome où Mussolini lui pose un lapin. Ensuite, vroum ! direction Ceylan, Java, Bali — qui l’émerveille — et Tokyo. Chaplin parle peu de lui : on découvre juste qu’il aime Nietzsche, Schopenhauer, Emerson, Plutarque et la Bible, et qu’il pleure à Kennington, le quartier où il grandit dans la pauvreté. Son récit reste néanmoins un document jouissif sur un monde qui n’allait pas tarder à disparaître.
ISBN : 9782373852592
ISBN ebook : 9782373850321
Collection : La Grande Collection
Domaine : États-unis
Période : XXe siècle
Pages : 224
Parution : 21 avril 2022