Vie de monsieur Leguat
Nicolas Cavaillès
Ouvrage lauréat du prix Goncourt de la nouvelle 2014
France, dix-septième siècle. La révocation de l’Édit de Nantes pousse certains à l’exil, tel François Leguat (1638-1735), huguenot forcé de quitter ses terres à l’âge de cinquante ans. Le destin de cet homme croise dès lors des contrées opposées et éloignées : Hollande, Mascareignes, île Maurice, Indes néerlandaises, Angleterre… Tour à tour gentilhomme des plaines de Bresse, aventurier de l’océan Indien et patriarche des bas-fonds de Londres, Leguat passera de l’Éden originel à la cité de l’Apocalypse. Nicolas Cavaillès s’empare littérairement de la vie de ce personnage hors-norme, y entremêlant quête spirituelle, découverte d’un monde inexploré et violence de l’être humain.
Né en 1981, Nicolas Cavaillès est l’éditeur de Cioran dans la Pléiade (Gallimard, 2011) et l’auteur de Vie de monsieur Leguat qui a remporté le prix Goncourt de la Nouvelle 2014 et de Pourquoi le saut des baleines, Prix Gens de mer 2015, Les Huit Enfants Schumann, mention spéciale du jury du Prix Françoise Sagan et du Mort sur l'âne.
Christian Oster, Le Monde
Voilà, porté à notre connaissance par les soins de l’auteur, un personnage qui non seulement a existé, mais qui de surcroît a vécu une vie tout à fait extraordinaire. Ce qu’il vient faire ici, on ne se le demandera toutefois pas longtemps, car monsieur Leguat, dont Nicolas Cavaillès restitue la vie (sobrement, comme le veut le genre des « vies »), d’après son récit de voyage et quelques autres sources, est occupé, en toutes circonstances, heureuse ou malheureuse, à se préparer à la mort, activité pleine de sagesse (selon lui) et de pondération (quel que soit le point de vue). Protestant exilé de Bresse en raison de la révocation de l’édit de Nantes (1685), il en vient, à l’âge de cinquante ans, « délivré du souci d’avoir une vie », à errer sur l’océan (« les deux effroyables rectangles bleus de la mer et du ciel ») en endurant épreuves et privations, puis à échouer avec quelques camarades d’exil sur une île déserte, un éden où il « voit dans sa nouvelle vie une excellente manière de la finir ». Il connaît là une période en effet heureuse, à laquelle il accepte, pour agréer ses camarades (à qui les femmes manquent), de mettre fin pour se retrouver, toujours par solidarité avec eux, à la suite d’une absurde accusation, assigné à résidence, malade et affamé, sur un étroit rocher exposé aux vents, mais qu’il quittera encore à peu près vivant pour écrire, plus tard, ses aventures, qu’il se laissera confisquer par un auteur à succès, lequel les déformera, sans réaction de sa part. Monsieur Leguat vieillira encore, dans un quartier déshérité de Londres, où il mourra, marié, à l’âge de quatre-vingt-seize ans. Il résulte de ce récit volontairement ramassé en peu de pages, d’une écriture économe et dense, la mise en perspective, à travers les aléas d’une vie objectivement extraordinaire, d’une trajectoire où, de l’exil à la mort, c’est tout l’ordinaire de notre condition qui vient s’imprimer, comme une trace. Nicolas Cavaillès nous parle de ce qui reste, une sorte d’« après tout » moins pessimiste qu’un « à quoi bon », sans doute, mais résolument lucide, d’une lucidité qui renvoie l’agitation humaine, y compris lorsqu’elle hérite, sous la pression des circonstances, des vertus du courage et du dépassement, aux modestes proportions de sa destination finale.
Didier Pobel, La Voix de l’Ain
L’académie Goncourt aurait-elle noué un pacte avec le département de l’Ain ? Après avoir, fin décembre, salué, pour le domaine de la poésie, « notre » écrivain de Jujurieux, Charles Juliet, la voici qui nous entraîne doublement du côté de Saint-Jean-sur-Veyle. C’est en effet là qu’est né, en 1981, Nicolas cavaillès qui vient de se voir remettre le Goncourt de la nouvelle pour sa saisissante Vie de monsieur Leguat, aux Éditions du Sonneur, à Paris. Or, son personnage, François de son prénom, était lui aussi originaire de cette commune bressane proche du val de saône qu’il dut quitter, en tant que huguenot, au lendemain de la révocation de l’édit de Nantes, en 1685. Devenu à 48 ans aventurier de l’océan Indien avant de mourir, quasi centenaire, dans les bas-fonds de Londres en 1735, le fantasque exilé revit magistralement sous la plume de son jeune compatriote, docteur ès-Lettres et responsable de l’édition de Cioran
dans la Pléiade. Mieux : de François à Nicolas, c’est un peu, soudain,
comme si les deux de Saint-Jean ne faisaient qu’un.
ISBN : 9782916136653
ISBN ebook : 9782373850345
Collection : La Grande Collection
Domaine : Littérature française
Période : XXIe siècle
Pages : 72
Parution : 18 septembre 2013